I WRITE SINS NOT TRAGEDIES

CLARENCE WALLES

Âge, lieu de naissance : déjà trente-neuf années derrière toi, la vie ne s'arrête pas et pourtant tu aimerais que le quarante ne s'affiche jamais. tu as vu le jouer un certain premier juillet, en ville.  Origines, nationalité(s) : américain et italien, un mélange explosif au fond des veines. Métier(s), études : maïeuticien, tu mets des enfants au monde tous les jours et pourtant tu es si blasé de la vie, après toutes ces années de métier. Statut civil, attirance sexuelle : séparé depuis quelques semaines seulement. personne n'est au courant et c'est sans doute mieux. un amour plus si pur, plus si puissant. lui et toi c'était idyllique. tu t'es jamais posé de questions en amour, pansexuel assumé. À Winton depuis : toujours. Groupe : peyton sawyer.

▐░  INDÉPENDANT ▐░  SOLITAIRE ▐░  RANCUNIER ▐░  MENTEUR

▐░  TENDRE ▐░  PATIENT ▐░  EMPATHIQUE ▐░  MÉTICULEUX

t'es l'aîné d'cette famille loin d'être parfaite. t'aurais parfois aimé être le seul. le seul à voir papa frapper maman, à voir les bleus se dessiner sur sa peau. le seul à passer ses soirées dehors en préférant avoir froid plutôt que mal. mais vous êtes trois. toi. baz. et peyton. famille dysfonctionnelle. deux garçons pour protéger la petite dernière, deux garçons pour dire stop et pour se barrer un peu trop vite de la maison familiale. t'as vécu dans la violence, t'as rendu les coups quand t'as été assez âgé pour le faire. et tu t'es battu pour pas tomber entièrement dedans. des études dans la santé pour aider les autres, pour aider les femmes à donner la vie. c'est pas courant et ça te rend fier. ça te rendait fier ; depuis quelque temps, t'as plus le courage de rien, plus l'envie d'aider personne, t'en peux plus de la vie et des vivants. ▐░ t'es pas un grand romantique et pourtant tu crois en l'amour. t'as jamais été du genre à vouloir terminer ta vie marié, avec quatre gamins et huit petit-enfants. et pourtant, pourtant t'es tombé amoureux et tu pensais avoir trouvé la bonne personne. il était interne en gynécologie, et t'étais à peine diplômé. vous en avez passé du temps, ensemble. mais jamais de bague au doigt, jamais de question fatidique. ça te convenait bien, jusqu'à que tout commence à s'effriter il y a plusieurs années maintenant. t'as rien montré parce que tu ne voulais pas qu'on s'inquiète pour toi. garder ta douleur pour préserver celle des autres. vous vous êtes séparés il y a quelques semaines et s'il a quitté votre duplex, toi, tu nages dans les souvenirs. t'aimerais qu'il revienne, que tout soit comme avant. mais il a des choses qu ne se réparent pas. ▐░ t'as jamais été du genre à te plaindre. jamais été du genre à l'ouvrir. parce que les bleus que papa laissait, tu ne pouvais pas souffler quoi que ce soit, tu pouvais pas en parler. alors t'as appris à tout garder à l'intérieur, t'as appris à ne rien dire, à garder toutes tes douleurs à l'intérieur. t'as toujours eu une santé de fer jusqu'à présent. jusqu'à il y a quelques semaines. fiévreux, pas franchement dans le meilleur état. tu mettais ça sur le compte de la rupture, de la peine de cœur. ▐░ t'as jamais compté tes heures. t'as jamais arrêté de vouloir aider les autres. t'as pourtant du lever un peu le pied après avoir frôlé le malaise en pleine garde. du haut de ton mètre quatre-vingts, t'as pas eu le choix que d'écouter tes deux collègues et que de prendre un peu de repos. mais ça a pas suffit. tu fais des poussées d'fièvre, t'es fatigué alors que tu fais pas grand chose. tu t'en rendu à l'évidence. une visite chez le médecin, tu ne pensais pas que ça allait aboutir sur des tas d'examens et de rendez-vous médicaux. tu ne pensais pas que ça te tomberait dessus un jour. tu ne pensais pas que ça pourrait te tomber dessus. t'es un mec bien, tu donnes la vie, alors pourquoi ? comme si la tienne était pas assez merdique. comme si il n'y avait pas assez d'emmerdes dans ta vie en ce moment. entre ton couple qui ne mérite même plus d'être appelé ainsi, tes relations parfois conflictuelles avec ta fratrie et ta santé ; y'a plus rien qui va. ▐░ deux semaines. deux semaines que tu fais comme si tout allait bien, que tu retournes bosser le sourire sur les lèvres. deux semaines que la fièvre te laisse en paix alors qu'une nouvelle poussée menace du jour au lendemain. deux semaines que tu te voilà la face à assurer à tout le monde que tout va bien. tu sais au fond de toi que tu ne vas pas pouvoir continuer comme ça longtemps, qu'il faudra bien que tu te rendes à l'évidence, que tu acceptes d'aménager ton emploi du temps pour te soigner et que tu en parles à tes proches. parce qu'ils méritent de savoir, parce que t'es pas censé être seul. parce qu'il y a ce foutu lymphome hodgkinien qui te bouffe de l'intérieur et que tu vas sombrer peu à peu si tu fais rien pour te sortir de là.